Le changement intervenu au sommet de l’Etat avait donné une lueur d’espoir sur la gestion des finances publiques. Des scandales financiers qui se multiplient ces derniers jours démontrent qu’il reste beaucoup à faire en matière de contrôle. La dernière sortie médiatique du ministre des finances Nicolas Kazadi sur une radio locale (Top Congo) laisse croire qu’aucune réforme d’envergure n’a été envisagée jusque-là pour freiner l’hémorragie.
Cette fois, des réseaux mafieux s’organisent au niveau de la chaîne de la dépense publique. Nicolas Kazadi a lui-même admis ouvertement qu’il est dans certains cas induit en erreur par ses services, dans un entretien à l’émission Face à Face avec Christian Lusakueno, en début de la semaine. Il a par exemple procédé par deux fois à autoriser un même paiement à hauteur de neuf cent mille dollars en faveur du Ministère de la culture et art. « C’est une situation dramatique, mais il y en a beaucoup qui arrive comme ça. Quand j’ai signé, je ne savais pas que le même document avait déjà été payé. Problème: le ministère du budget aurait envoyé le DTO avec la mention régularisation, ce qui n’a pas été fait. Du coup, le ministre du budget et moi avons été abusés par nos services. Malheureusement, le bénéficiaire s’est fait payer à la BCC », a-t-il regretté.
D’après le manuel des procédures du circuit de la dépense publique, les contrôleurs budgétaires jouent un rôle de premier plan avant tout paiement par le trésor public. Objectif, s’assurer de la régularité de l’acte budgétaire. Sans moyen ni considération, le métier n’est pas valorisé par l’Etat, affirment certains à Tsieleka. Couplés à l’inspection générale des finances, qui a déployée ses agents dans le cadre de la patrouille financière, la combinaison des deux actions devrait en principe apporter des effectifs positifs. Pour l’instant, la situation va de mal en pis.
«On nous a aussi fait pression pour le paiement d’un DTO, qui concerne la construction d’une caserne pour militaire à Mbandaka. J’ai eu des doutes sur la réalité de ce projet », raconte le ministre des finances à Top Congo. Et de poursuivre, « dans le document on m’a fait comprendre que les travaux ont été achevés, en me présentant un PV de réception des ouvrages. J’envoie une mission pour vérifier et celle-ci trouve que rien n’a été fait sur place. On a juste démoli ce qu’il y avait. Le coût de démolition, c’est juste 25.000 dollars. Puis, on n’a jamais construit la moindre brique. Mais ils prétendaient que la construction avait été faite à 70% avec 11 villas pour 6 millions de dollars. Heureusement que je n’ai pas payé. Et ils ont abusé le Ministre de la défense qui est rigoureux dans son travail ».
D’après certains experts, il est temps de déconcentrer l’ordonnancement de la dépense publique et de basculer vers le budget-programme, en application à la loi relative aux finances de juillet 2011. Ceci induit une responsabilisation accrue des acteurs. La redynamisation de la cour des comptes aurait également un effet dissuasif, d’après la recommandation des experts en atelier de validation du nouveau stratégique de la réforme des finances publiques. La campagne lancée par l’observatoire de la dépense publique (Odep) pour la viabilisation des organes de contrôle étatique, va donc dans ce sens pour rendre les finances publiques au service de la lutte contre la pauvreté.
Valéry Bakutweni