Si la pandémie de Covid-19 a mis à l’arrêt une grande partie des activités mondiales faisant ainsi baisser de manière non négligeable les émissions de C02 en 2020, ce répit pourrait être de courte durée. Ces dernières décennies, la crise climatique résultant de l’accumulation des émissions dans l’atmosphère a continué de s’aggraver. C’est le constat du nouveau rapport d’Oxfam qui met en lumière les inégalités extrêmes en matière d’émissions de CO2.
Ce rapport révèle notamment qu’entre 1990 et 2015, 10% les plus riches de la population mondiale ont été responsables de 52% des émissions de CO2 cumulées. 1% des plus riches sont responsables de deux fois plus d’émissions que la moitié la plus pauvre de l’humanité.
Entre 1990 et 2015, les émissions annuelles ont augmenté de 60% et les émissions cumulées ont doublé. Selon le dernier rapport d’Oxfam, durant cette période critique :
Les 10% les plus riches de la population mondiale (environ 630 millions de personnes) sont responsables de 52% des émissions de CO2 cumulées, soit près d’un tiers du budget carbone mondial au cours de ces seules 25 années.
Et les 1% les plus riches de la population sont responsables à eux seuls de 15% des émissions cumulées.
Les 50% les plus pauvres sont responsables de seulement 7% des émissions de CO2 cumulées, soit 4% du budget carbone disponible.
La croissance totale des émissions des 1% les plus riches est 3 fois plus élevée que celle des 50% les plus pauvres.
Si l’année 2020 et les restrictions liées à la pandémie de Covid-19 ont entraîné une baisse des émissions dans le monde, la tendance globale, elle, n’a pas changé : à moins que les émissions ne continuent de chuter considérablement, le budget carbone mondial visant à limiter le réchauffement à 1,5°C sera complètement épuisé d’ici 2030.
Nous avons calculé que les inégalités sont telles que les 10% les plus riches passaient à eux seuls ce budget quelques années plus tard et ce, même si les émissions du reste de la population mondiale devenaient nulles dès demain.
Une croissance économique inégale qui a un coût climatique
La crise climatique s’est accélérée entre 1990 et 2015, période durant laquelle les émissions totales cumulées dans l’atmosphère ont doublé. Dans le même temps, et malgré une hausse considérable du PIB mondial, les inégalités de revenus se sont intensifiées dans le monde.
Cette croissance économique inégale a des effets pervers à plusieurs niveaux, notamment parce qu’elle ralentit le rythme de réduction de la pauvreté et qu’elle a un impact sur le budget carbone mondial. Celui-ci s’épuise plus rapidement, au profit d’une minorité de personnes parmi les plus fortunées au monde. Or, les personnes les plus pauvres, qui contribuent le moins au réchauffement climatique, sont pourtant celles qui en sont le plus victimes. Sans oublier les générations futures qui hériteront d’un budget carbone épuisé et d’un climat encore plus dévastateur.
L’essentielle lutte contre les inégalités en matière d’émissions de CO2
Afin de limiter le réchauffement planétaire à 1,5°C, la moyenne mondiale des émissions par habitant-e devrait être d’environ 2,1 tonnes/an d’ici 2030. Pourtant, selon les estimations du dernier rapport d’Oxfam, l’empreinte carbone par habitant-e des 10 % les plus riches est plus de 10 fois supérieure à l’objectif fixé et celle des 1% les plus riches 35 fois plus élevée. En France, la même tendance s’observe : l’empreinte carbone moyenne d’un individu appartenant aux 10% les plus riches est de 17,8 tonnes de CO2 par an contre seulement 3,9 pour les 50% les plus pauvres, soit 4,5 fois plus. Et l’écart est 13 fois plus important lorsqu’on compare les 1% les plus riches aux 50% les plus pauvres en France.
Il est indispensable que les gouvernements inscrivent la lutte contre la crise climatique et celle des inégalités au cœur des efforts de reprise suite à la pandémie de Covid-19, et proposent des changements systémiques. Il s’agit là d’une occasion unique pour s’atteler au développement d’une économie plus juste, qui tient compte des limites de notre planète.
La France doit prendre sa part de responsabilité, notamment dans le cadre de la relance de son économie. A la lumière des révélations de ce rapport, il serait inimaginable que le gouvernement baisse aveuglément les impôts des grandes entreprises polluantes et leur verse des aides sans aucune contrepartie écologiques et sociales.
Le gouvernement doit au contraire investir dans les services publics et les secteurs sobres en carbone, comme les transports publics. Ce sont les conditions sine qua non pour faire face à la crise climatique et enrayer le creusement des inégalités.
Le budget carbone mondial définit la quantité maximale de dioxyde de carbone pouvant être émise dans l’atmosphère afin de limiter la hausse de la température moyenne dans le monde à 1,5 °C, objectif défini dans l’Accord de Paris et ainsi d’éviter les pires impacts d’une crise climatique non contrôlée.
Tsieleka